Il y a deux ans, Irène était encore l’épouse discrète et rangée d’un fonctionnaire de police taciturne et fat, que le sentiment amoureux et le désir sexuel pour sa tendre moitié avaient déserté depuis longtemps. Après dix ans de mariage, qui furent autant d’années d’engourdissement conjugal, elle habite désormais seule avec ses deux filles. “J’ai quitté un joli pavillon de banlieue pour un F3 dans une résidence, mais je me sens pousser des ailes. C’est un sentiment de liberté incroyable…” Plus belle que jamais, au seuil d’une quarantaine assumée, elle draine désormais les hommes dans son sillage “comme la fleur gorgée de pollen attire les abeilles butineuses”, ose-t-elle, encore étourdie par son propre succès.
« J’ai deux vies, raconte Irène. En semaine, je suis la sage et irréprochable maman de mes deux adorables fillettes et le week-end, une fois les petites chez leur père, je me déchaîne littéralement. Depuis que j’ai rompu avec mon ex, je me moque de tout, je m’amuse comme une gamine. J’ai besoin de retrouver cette insouciance, de voir du monde, de rire comme une folle, de m’éclater sans penser à demain. J’ai une copine, Christine, une délurée avec qui je fais les quatre cents coups : on est allées voir un spectacle de strip-tease de mecs, on sort en boîte. On partage les mêmes amants. Dès le lundi matin, j’attends le vendredi soir avec l’impatience des jeunes amoureuses…”
Belle, spirituelle, naturelle avec cela, à quarante-deux ans, l’honnête femme s’est muée en bacchanale enchanteresse. “Les mecs, j’y pense sans cesse, j’ai envie de rattraper le temps perdu ». Depuis sa rupture, elle a senti poindre en elle une ardente fièvre d’amour et se prend à courir les mâles avec la fougue d’une jeune femelle en rut. “Je suis restée des semaines sans baiser lorsque j’étais mariée. Et ça ne me posait pas de problème ! C’est comme si j’avais vécu en apnée pendant toutes ces longues années de vie commune. Aujourd’hui, je ne pourrais plus. J’ai trop besoin…” Alors elle marivaude, joue au jeu de l’amour et du hasard partout, au bureau, au restaurant, au supermarché, ne perd jamais une occasion de se faire remarquer pour satisfaire sa martingale érotique. “J’ose faire ce que d’autres femmes se contentent de rêver. Quand un homme me tape dans l’oeil, j’engage la conversation et s’il tient la route, je n’hésite pas à lui laisser mon numéro de portable.”
Cette blonde délurée s’est découverte affolante callipyge sur le tard. Constatant jour après jour l’effet unanime de ses fesses rebondies sur la gente masculine, elle a décidé de les mettre à leur avantage. “J’ai compris que même en jeans, je pouvais être alléchante pourvu que le modèle me galbe bien ». Frivole, elle s’est achetée ou fait offrir des robes moulantes, fendues sur le côté, et toutes sortes de combinaisons affriolantes, tout en bretelles, dentelles et porte-jarretelles: “J’ai complètement révolutionné ma garde-robe. Maintenant j’adore les tenues coquines. Les hommes me trouvent plus désirable qu’il y a dix ans, c’est fou.” Avide d’expériences nouvelles, elle découvre enfin des potentialités sexuelles inexplorées, faisant fi des pudeurs inutiles : “Je n’avais connu qu’une seule aventure pendant le mariage, et encore, c’était tout ã la fin. Aujourd’hui, non seulement je me fais draguer, mais je drague ! Je peux dire à un mec qu’il a un beau cul. Je ne suis pas une salope, j’aime l’amour, pleinement, compulsivement. D’ailleurs, je ne sais jamais avec qui je vais finir la nuit. La semaine dernière, j’ai couché avec trois mecs différents. J’ai fait l’amour jusqu’au petit matin, alors que mon fonctionnaire de mari expédiait ça à la va-vite. Et puis, je ne me serais jamais crue capable de me taper des jeunots de vingt-deux ans, vingt-cinq ans. Maintenant, je ne me prends plus la tête, je suis méconnaissable. Je crois que je suis enfin adulte sexuellement. »
Naguère maladroite dans l’art de prodiguer des caresses, faute dit-elle d›avoir jamais rencontré celui qui lui enseignerait la juste manière de faire, Irène est devenue experte avouée de la chose… Sa gaucherie passée est bien révolue : ‘J’ai découvert la véritable ivresse des caresses, j’y ai pris goût et je n’en perds pas une goutte. Ce fut une vraie révélation. Mes amants ne se plaignent pas. Et puis, il y a des choses que mon mari n’aurait jamais faites, des choses que je n’aurais jamais osé imaginer avec lui. Aujourd’hui, je n’ai plus honte de rien. Ie veux être aimée du bout des doigts au creux des reins. C’est si bon…”
“Depuis deux ans, j’ai l’impression d’être partie à la recherche d’une autre moi-même et le voyage sera long. Chaque aventure me révèle un peu plus qui je suis. Bien sûr, je m’attache parfois, mais toujours à plusieurs à la fois! J’aime trop les gens, leurs différences, leurs complémentarités pour me limiter à un seul partenaire. J’aime la vie, je suis une femme épanouie. Je vais au musée, au théâtre, je voyage. Je rencontre des gens intéressants hors de mon milieu professionnel. Mes rapports avec les hommes ont complètement changé, j’ai appris à les connaître. Mes filles sentent bien que je suis plus sereine qu’avant. Et puis, moi qui avais toujours rêvé dechanter, je me suis inscrite dans une chorale. Finies les frustrations : je fais enfin ce que j’aime, tout ce que j’aime, rien que ce que j’aime !
– “Est ce que je redeviendrai parfaitement monogame un jour ? Je ne sais pas, je suis devenue trop anticonformiste, je suis allée trop loin pour me contenter d’un seul homme, fût-il le Prince Charmant…
Extraits du livre « Eloge de la Séduction » de Veronique Julien et Xavier Deleu